S.2 – Episode 1 – Il s’étouffe et crache.

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Il s’étouffe et crache.

Il fait couler un peu d’eau dans l’évier puis se retourne vers Norma qui l’interroge du regard.

– Ton café est vraiment dégueulasse.
Il a le don d’en faire toujours trop…
– J’ai cru que tu t’étais brûlé la langue.
– Ma mère t’a montré comment faire, c’est pas compliqué.
– Mais en fait non ! T’arrives encore à me parler de ta mère… J’aime pas faire le café avec ton truc, là. Je le fais toujours bouillir. La technologie est passée par là, depuis. Je préfère utiliser ma cafetière.
– Ben moi je trouve que ça fait du café merdique. Alors si tu veux me faire plaisir en préparant mon petit dej’ le matin, apprends à le faire comme j’aime.
– Comme ta mère !
Jonathan est déjà parti dans la chambre pour s’habiller.
– Et après je renverse la tasse pour lire l’avenir dans le marc, comme ta grand-mère ? Pour savoir si je vais bientôt me marier…
Il lui crie depuis la chambre :
– Ça, je peux te donner directement la réponse…
– Ou si je suis enceinte…
Jonathan se penche dans l’embrasure de la porte :
– … pas tant que tu sauras pas faire un café digne de ce nom.
Il a mis la chemise bleue qui lui va si bien. Il ajoute :
– Et pour le dernier truc, y a pas intérêt.

Elle ne veut pas d’enfant. Pas maintenant. Pas avec lui. Mais cette dernière réplique, et le ton qu’il a pris, lui laisse une petite entaille au cœur. Elle répond :
– Ou bien je vais peut-être lire dans le marc de café que tu vas bientôt mourir. Par strangulation !… Quoi ? Pourquoi tu me regardes comme ça ?
– Tu devrais pas faire ce genre de blagues Norma, alors que t’as été convoquée par la police y a seulement deux mois pour le meurtre d’un mec… Mort ÉTRANGLÉ , justement. Ferrarra, t’as oublié ?
– N’importe quoi. Je sais même pas pourquoi ils ont voulu m’interroger. Ce gars m’a renversée en voiture, ok. Mais je le connaissais pas.
– Ah… tu sais pas pourquoi la police t’a interrogée ?
– Ils aiment perdre leur temps, je crois. Ou le flic voulait me draguer…
– C’est pourtant évident, c’est à cause de ton ascendance !
– Hein ?
– Ils savent qui est ton père. T’y as jamais pensé ?
– Mon père n’a rien à voir dans cette affaire.
– T’en es bien sûre ?
– T’es pas drôle.
– Ou alors c’est moi.
Il s’approche d’elle et l’embrasse à la commissure des lèvres.
– Je supporte pas qu’on touche à toi, bébé.

Il lui donne un baiser passionné, en lui caressant les cheveux. Puis il part en claquant la porte de l’appartement.

 

 Ça fait presque deux mois que c’est devenu plus sérieux entre eux. Il ne fait plus le mort quand elle l’appelle. Il vient chez elle presque tous les soirs et il reste jusqu’au matin. II lui a présenté sa mère…  Aussi sérieux que possible, donc…

Deux mois… ça a commencé juste après l’assassinat de Ferrarra, à la vérité.

Mais Norma ne croit pas Jonathan quand il dit qu’il est impliqué dans l’histoire. Depuis qu’elle le fréquente d’un peu plus près, elle a remarqué qu’il avait une appréciation toute particulière du concept de vérité. Elle l’a surpris, bien des fois, en train de se faire mousser devant ses amis, déformant les récits de ses exploits, plus ou moins fictifs d’ailleurs. Elle a tout de suite trouvé ça un peu pathétique. Et elle a commencé, avec bonheur, à le mépriser. « Ça m’empêchera définitivement d’en tomber amoureuse » pense-t-elle, pleine de satisfaction. Bien sûr, il l’attire toujours autant. Il est beau, drôle parfois, et leur entente physique la comble. Et puis, elle l’a eu, ENFIN ! Il dort dans son lit. Il la présente comme sa compagne officielle. Il critique sa cuisine, « Quoique ça, il le faisait déjà avant… ». Et elle attendait ce moment, former un couple avec lui, pour de vrai, depuis si longtemps. Elle a placé tellement de choses dans cette attente. Tout un monde de rêves et de projets. Des heures de soupirs et de lamentations. Ça ne s’efface pas comme ça, les rêves et les lamentations.

 

– T’es encore en retard !

À peine a-t-elle poussé la porte de la librairie, que Yohan lui tombe dessus. Il a pris ce ton exaspéré qu’elle ne supporte pas.
– Bonjour quand même.
Il lui désigne une pile de cartons :
– On a été livré. Y a tout ça à rentrer et à mettre en rayons. Je compte pas me taper le boulot tout seul.
– Comme si je te laissais bosser seul.
– Depuis que tu vis avec ton prince charmant… ouais, un peu ! Beaucoup… Passionnément. Mais bon, c’est vrai que ça doit te prendre du temps de lui faire griller ses tartines, le matin…
« Allez, ça faisait longtemps ». Pas une journée sans qu’il ne lui fasse une petite réflexion sur Jonathan.
– Tiens d’ailleurs, on a reçu un bouquin qui pourrait t’intéresser.
Yohan lui présente un livre dont elle aperçoit le titre : « J’ai vécu avec un pervers narcissique ».
– Y a un chapitre intitulé « Se libérer de son emprise », page 119. Ça pourrait peut-être t’aider.
– Moi aussi j’en ai un pour toi.
Et elle lui colle sous le nez la couverture de : « Sortir du célibat : comment progresser rapidement ». Il lui sourit en lui lançant :
– Celui-là, je vais pas l’acheter, tu me prêteras ton exemplaire plutôt… Celui que t’as annoté… Vu que ça t’a réussi apparemment…
« 1-0. Ok, je ne réplique pas, je risque de m’enfoncer. Qu’est-ce qu’il peut m’agacer quand il me cherche… ». Norma préfère ouvrir un carton et elle commence à pointer son contenu. Mais Yohan n’a pas fini :
– Par contre, tu as dû sauter le chapitre 6 : « Évitez les latinos alcoolisés dans les bars ». Sous-titre : « Leur machisme agressif, héritage civilisationnel, pourrait bien vous indisposer aussi vite que leurs odeurs de sueur rance ».
Elle relève les yeux pour le dévisager. Mais Yohan lui a déjà tourné le dos et s’enfonce dans les profondeurs du magasin en ricanant. Il faisait référence à Carlos et à ce qui s’est passé il y a 2 mois, Norma en est sûre. Ce type qui l’avait traitée d’allumeuse et insultée, jusqu’à ce qu’Alex, sa sœur, s’en prenne à lui. Avec ses copines, elles avaient rêvé d’une bonne punition pour lui et le lendemain il avait été retrouvé ligoté à un réverbère, passé à tabac. Que venait faire Yohan dans tout ça… Elle avait cru l’apercevoir dans le bar lorsqu’elle dansait avec Carlos. Finalement, elle n’avait pas rêvé. Mais Yohan n’en a jamais parlé jusqu’à présent. Pourquoi tient-il maintenant à ce qu’elle le sache : il était sur place, ce soir-là…

Suite au prochain épisode…

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